Boris Vian pataphysicien

Les liens de Boris Vian et du Collège ont été étroits, ce dont témoigne le livre de Thieri Foulc et de Paul Gayot ^[1]. « Ce n’est pas de l’amitié, c’est de l’amour » disait Vian lui-même pour qualifier cette relation.
La ’Pataphysique ayant été définie comme Science des solutions imaginaires, Vian apporte des trouvailles sans cesse renouvelées :
‒ Le soleil est une pieuvre aux bras rétractiles qui viennent nous caresser ou tâter le plancher.
‒ On mange des limaces bleues pour voler.
‒ Les bateaux ont des pattes pour marcher au fond de l’eau.
‒ On remonte le temps dans une sorte de cage d’ascenseur.
‒ Les inhalations florales peuvent combattre les nénuphars pulmonaires.
Le T. S. Latis a célébré en son temps cette « capacité inépuisable et multivalente d’engendrer des solutions imaginaires. »

Mais la ’Pataphysique est aussi définie par le principe d’Équivalence qui nous fait tout « accueillir et cueillir avec même avenance ^[2] ». Ce qui conduit le pataphysicien à promouvoir les idées et les formes d’art les plus délaissées, laissant au tout venant culturel la célébration des valeurs reconnues. Vian exprime ainsi cette attitude :
« Je m’applique volontiers à penser aux choses auxquelles je pense que les autres ne penseront pas ^[3]. »

Les contributions de Vian à la revue du Collège ont été très diverses. Dans ses « Lettres au Collège » (Lettre sur les truqueurs de la guerre, sur la sagesse des Nations…), l’imagination suit une logique débridée, héritage d’un de nos saints, Lewis Caroll, autre scientifique dévoyé. Elles illustrent bien le goût du pataphysicien pour les solutions obliques, les subterfuges, qu’encourage la Sous-Commission des Biais. C’est dans les Dossiers que parurent d’abord Les Bâtisseurs d’Empire (Dossier 6), Le Goûter des généraux (Dossiers 18-19) ou Arne Saknussemm (Dosssier 12), belle et amère saynète.
On donne ici un poème paru dans le Cahier 25, « La Cantate des boites ». Son sujet semble bien dérisoire et peu poétique, mais, en vertu de l’Équivalence, le pataphysicien célèbre ce que les autres délaissent. Les illustrations d’époque sont probablement dues à notre Administrateur-Opitulateur Général Raymond Fleury.